Choisis bien tes ennemis est le deuxième volet de la Trilogie des Secrets du Pouvoir de Robert N. Charette, centrée autour du personnage de Sam Verner, désormais plus connu sous son nom de rue “Twist”. Ancien decker corpo devenu shadowrunner malgré lui suite à une série de machinations draconiques racontées dans le premier tome, Twist est désormais parfaitement acclimaté aux Ombres. Parallèle amusant, le roman s’ouvre avec un boulot d’exfiltration effectué par Sam et son équipe qui n’est pas sans rappeler la scène d’ouverture de Ne traite jamais avec un Dragon.
Sam souffre encore d’un blocage intellectuel à l’idée d’embrasser son talent chamanique, malgré sa vision de son totem (Chien) au cours des évènements du précédent roman. Il fait également toujours équipe avec Dodger, l’elfe prodige de la Matrice. Au cours d’une mission pour un Johnson anglais nommé Andrew Glover, Sam et Dodger découvrent que leur employeur fait partie d’une cabale de druides, le “Cercle Secret”. Dirigé par un homme d’affaire obèse du nom de Hyde-White, le Cercle prépare un rituel sanglant pour “restaurer la Terre” et renverser le gouvernement britannique. Ou quelque chose du genre, ce n’est pas très clair…
Devenu malgré lui complice de leurs exactions, Sam n’aura de cesse d’affronter les druides afin de contrecarrer leurs plans, d’autant plus qu’il découvre que sa sœur Janice pourrait être liée au complot. Sam sera aidé dans sa quête par Katherine Hart, qui travaille cette fois-ci pour les elfes du Tír na nÓg. Mais la loyauté de la belle est comme toujours insaisissable, de même que ses sentiments pour Sam…
Choisis bien tes ennemis entraîne ses protagonistes sous de nouvelles latitudes, puisque l’essentiel de l’action se déroule cette fois-ci en Grande-Bretagne. L’occasion pour l’auteur d’introduire de nouveaux concepts, comme la présence de lignes de pouvoirs quadrillant l’île (les fameuses ley lines), ou le royaume elfique du Tír na nÓg, qui n’est d’ailleurs jamais explicitement identifié sous ce nom. Comme souvent, ce roman est également l’occasion de mettre une nouvelle menace sous les projecteurs : cette fois-ci, il s’agit de la tradition Toxique. La différence entre les différents types de magie est d’ailleurs assez bien illustrée.
Comme dans le précédent roman, la narration de Robert N. Charette est assez confuse à suivre, en raison de l’affection de l’auteur pour les ellipses diverses et variées. Des scènes-clés se déroulent hors-champ, et on n’apprend ce qui s’est passé que dans le chapitre suivant, presque par hasard, au détour d’une remarque d’un protagoniste. On a beau savoir que c’est l’édition intégrale du roman, le sentiment qu’il “manque des bouts” est fréquent. Le personnage de Hyde-White est intéressant, et réserve quelques surprises, mais au final ses intentions demeurent obscures. Sympathique dans le premier roman, Sam est assez tête-à-claques dans celui-ci, en raison de sa sempiternelle obstination et son manque de confiance (justifié ou non) envers ses équipiers. On se demande comment Dodger parvient à le supporter…
Au final Choisis bien tes ennemis est un roman divertissant mais qui semble très décousu et inégal. Il contient néanmoins suffisamment de morceaux de bravoure pour demeurer une lecture plaisante. L’un des points forts du roman est la présence de wendigos, des orks atteints du VVHMH et transformés en créatures poilues et cannibales. Charette parvient à ne pas en faire de “bêtes” monstres mais des créatures complexes (bien que sacrément vicieuses). Pour conclure, ce deuxième tome des Secrets du Pouvoir n’est pas le pire roman Shadowrun jamais écrit, mais c’est aussi loin d’être le meilleur. Il reste une bonne inspiration pour dépeindre des Chamanes toxiques, et ses méchants sont suffisamment manipulateurs et charismatiques (en plus d’être… “inhabituels”) pour que l’on aie envie de s’en inspirer pour ses propres scénarios.